A l’initiative de son
vice-président, il a été demandé au Comité Excelsis d’analyser l’entretien de
Cédric Meeschaert, Président de la société de gestion Meeschaert, publié le
22/07/2016 dans Les Echos par Kévin Badeau sous le titre « Cédric
Meeschaert met la finance au service du bien commun »[1] (ci-après l’« Article »).
ANALYSE
La société de gestion
Meeschaert, pionnier en France dans la gestion d’actifs dite
« éthique », est reconnue à juste titre comme ayant des valeurs
humaines et chrétiennes dont elle s’efforce d’alimenter sa pratique
professionnelle. Cela dit, l’Article met en évidence (i) un risque de confusion
caractérisé entre, d'une part, des produits financiers chrétiens ou
chrétien-compatibles et, d'autre part, des produits financiers non chrétiens,
et (ii) des incompatibilités avec la Charte Fondamentale de la Finance Ethique Chrétienne, publiée le 15 août 2015 (ci-après la « Charte Financière Chrétienne »).
(i)
Du risque de confusion
La société de gestion Meeschaert,
agréée par l’AMF, est généralement identifiée par les médias et l’Eglise comme
un acteur financier chrétien de premier plan. Dans l’Article, son rôle pionnier
est rappelé fort à propos avec la création en 1983 du premier fonds éthique
chrétien « Nouvelle Stratégie 50 » à l’initiative de Sœur Nicole Reille.
Cependant, il n’apparaît
dans l’Article aucune distinction entre, d’une part, les fonds chrétiens et
chrétien-compatibles gérés par Meeschaert (p. ex. Proclero, Ethique et Partage)
et, d’autre part, les fonds éthiques sous-gestion incompatibles avec les
valeurs chrétiennes.
Par conséquent, un
risque de confusion est susceptible de causer un préjudice éthique et moral auxinvestisseurs en laissant entendre que certains placements ou
produits proposés par le groupe Meeschaert sont compatibles avec l’éthique
chrétienne alors que ce n’est pas le cas.
(ii)
Des incompatibilités avec la Charte Financière Chrétienne
L’Article offre une
présentation tronquée des risques éthiques. Il est déclaré que la société de
gestion Meeschaert investit « les actifs qui lui sont confiés, via des
fonds communs de placement (FCP), dans des entreprises sélectionnées selon des
critères éthiques et de développement durable. Parmi elles : Schneider
Electric, Crédit Agricole ou Blue Solutions, soucieuses notamment de
l'efficacité énergétique, de la prévention de la corruption ou encore de la
santé des collaborateurs ».
Cependant, pour ne s’en
tenir qu’à la société Crédit Agricole SA, les titres de celle-ci ne peuvent
être présentés comme des actifs « responsables » au regard des
principes établis dans la Charte Financière Chrétienne (article 2.3) alors que
cette entité a été récemment mise en cause dans l’affaire des Panama Papers
pour évasion fiscale via ses filiales offshore.
Par conséquent, sans qu’il
soit besoin de rentrer plus en détail dans les sélections, certaines valeurs
inscrites dans les portefeuilles gérés par la société de gestion Meeschaert
sont manifestement incompatibles avec la Charte Financière Chrétienne.
De façon générale,
l’analyse de l’Article laisse apparaître des manquements aux obligations visées
par l’article 3.2. de la Charte, notamment l’obligation pour les acteurs de la
finance chrétienne de s’efforcer à la prudence dans leur communication. Nous
comprenons toutefois que le travail journalistique soit enclin à des raccourcis
qui trahissent trop souvent la réalité, sans que cela dispense les acteurs
concernés par leurs travaux à réagir de façon à préserver leur probité au
regard de la Doctrine Sociale de l’Eglise.
CONCLUSION
Le Comité Excelsis
rappelle que les acteurs financiers chrétiens ont la responsabilité de
promouvoir une finance éthique ayant pour finalité un développement durable et
vertueux visant le bien de tous et plaçant le bien de l’homme (et non le
profit) comme premier objectif.
Si certains fonds
éthiques sont susceptibles d’être reconnus comme chrétiens ou
chrétien-compatibles, c’est toutefois à la condition qu’ils se conforment en
tout point aux principes présentés dans la Charte Financière Chrétienne.
Afin de permettre des décisions
d’investissement vertueuses et d’établir la confiance au sein du secteur
financier éthique chrétien, les acteurs financiers chrétiens sont invités à
toujours veiller à différencier, dans leur communication, les produits et
services qui se conforment aux principes éthiques chrétiens de ceux qui ne s’y
conforment pas (voir Codofine Position 2015-04).
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Paris, le 8 août 2016
Comité Excelsis (ofccfo)